Assetou SYLLA
Etudiante Conservatoire Balla Fasseke
Tél. : 70 30 15 85
Bamako
Contexte National :
Les trois quarts de la population vivent en zone rurale. La société malienne se compose de différents groupes ethniques répartis sur l’ensemble du territoire national. Ils sont nomades ou sédentaires et de fait évoluent dans trois systèmes de production dominants, à savoir l’agriculture, la pêche et l’élevage, sur lesquels viennent se greffer l’artisanat et le commerce. Ces groupes ethniques se caractérisent traditionnellement par une forte hiérarchie sociale et la spécificité de la différenciation des rôles masculin et féminin (les hommes dans un rôle productif, les femmes dans un rôle reproductif). Les pratiques coutumières et religieuses demeurent encore les références pour la gestion des rapports entre les femmes et les hommes dans la famille. Elles sont malheureusement utilisées pour justifier des comportements et pratiques néfastes comme le lévirat/ sororat, l’excision, les bastonnades, les mariages précoces et forcés.
Contexte légal de Genre et politique :
Le Mali dispose de peu d’instruments juridiques nationaux œuvrant pour l’égalité des genres. La Constitution garantit les mêmes droits aux citoyens des deux sexes sans discrimination, et stipule que chaque époux conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens, en l’absence de stipulation expresse contraire. Le Code des personnes et de la famille est plus mitigé. Si la répudiation est interdite, la polygamie y est autorisée, mais le mari a une obligation d’équité entre les épouses et les époux peuvent se représenter mutuellement pour les besoins du ménage. L’âge du mariage est fixé à 18 ans pour les garçons et 16 ans pour les filles. On y retrouve aussi l’obéissance de la femme à son mari et la consécration du mari en tant que chef de famille et détenteur de l’autorité parentale. Le Code prévoit la succession sans distinction de sexe, mais fixe que l’héritage est dévolu selon les règles du droit religieux, coutumier ou à défaut du Code lui-même.
Il n’y a pas de loi spécifique sur les violences envers les femmes, la violence domestique ou le harcèlement sexuel, mais le viol est sanctionné par le droit pénal. La loi d’orientation agricole prévoit un accès équitable aux ressources foncières agricoles et la possibilité de prendre des mesures discriminatoires positives pour les groupes vulnérables. Depuis 2015 une loi prévoit des quotas de 30 % minimum de l’un ou de l’autre sexe dans les institutions et sur les listes électorales. Une Politique nationale genre existe depuis 2011. Enfin, différents documents stratégiques intègrent le genre dans leurs actions et objectifs.
Au niveau international, le Mali a ratifié sans réserve la CEDEF, son protocole sur la violence à l’égard des femmes, et le protocole de Maputo. Même s’il a ratifié d’importants instruments internationaux, le Mali n’a pas encore mis son dispositif national en cohérence. D’une part, si des dispositions juridiques existent en faveur de l’égalité des sexes et de promotion de l’autonomisation de la femme, dans la pratique, les coutumes et religion entravent l’application de ces textes. D’autre part, les lacunes juridiques dans certains domaines (notamment sur la violence domestique) légitiment les pratiques coutumières. La femme a le droit de demander le divorce, mais en pratique – surtout en zone rurale – elle ne le fait pas de peur de perdre le droit de garde de ses enfants, et sous la pression sociale. Au niveau de la représentation et de la participation à la prise de décision dans la gouvernance du pays, malgré la loi, les taux sont très faibles.
Éducation :
Le taux d’alphabétisation de plus de 15 ans stagne autour des 33 % ces dernières années, et avec des disparités fortes selon le milieu rural ou urbain, selon le sexe et selon la richesse des ménages. L’analphabétisme est le principal obstacle au renforcement des capacités des femmes. La disparité entre garçons et filles au niveau de la fréquentation scolaire du premier cycle de l’enseignement fondamental s’atténue progressivement. Ainsi, les taux bruts de scolarisation des garçons et des filles s’élèvent respectivement à 77,2 % et à 74,8 %12.
Des mesures incitatives ont été prises comme la fourniture de matériels scolaires (livres de lecture, cahiers, calculatrices, etc.) aux filles pour accroître leur scolarisation et leur fréquentation scolaire, les cantines scolaires pour accroître la fréquentation scolaire, l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants par l’adoption d’un statut particulier, la création de centres d’éducation pour le développement, de centres d’alphabétisation fonctionnels et de centres d’apprentissage féminins qui ont permis d’accroître le taux de fréquentation scolaire dans la formation professionnelle notamment.
Les principales raisons de l’abandon scolaire sont l’éloignement des infrastructures pour les milieux ruraux, l’échec scolaire, le désintéressement des parents, le manque de moyens, et spécifiquement pour les filles, les mariages précoces, la peur d’une grossesse hors mariage, les grossesses précoces et la pauvreté du ménage.
Santé :
La Constitution du Mali en son article 3 reconnait le droit à l’intégrité physique et interdit la torture, les traitements inhumains cruels et dégradants. Pourtant, les mutilations génitales féminines concernent encore 9 femmes sur 10, et cette pratique est tellement ancrée dans les normes sociales que trois femmes sur quatre estiment qu’elle doit perdurer (pratique aperçue comme rite de passage à l’âge adulte et facteur déterminant de la maniabilité). L’insécurité alimentaire est également présente. Cette problématique impacte spécifiquement les femmes dès lors qu’elles ont tendance, en cas de manque de nourriture suffisante, à se priver de leur ration au profit de leurs enfants.
Violences envers les femmes :
La violence basée sur le genre est très répandue, systémique et culturellement ancrée au Mali. Pour le mois de mars 2020, 304 cas de VBG ont été rapportés, avec une forte proportion de violences sexuelles (25%) dont 15% de viol et 10% d’agressions sexuelles. Au niveau de la violence domestique, trois femmes sur quatre estiment encore à l’heure actuelle qu’il est justifié que son mari la batte pour l’une des cinq raisons suivantes : brûler la nourriture, argumenter avec lui, sortir sans le lui dire, négliger les enfants et refuser d’avoir des rapports sexuels avec lui. Étonnamment, les hommes sont moins nombreux que les femmes (54 %) à estimer la violence justifiée pour l’une des cinq raisons énumérées.
Les femmes et les filles représentent toujours une forte proportion de la population touchée par la pauvreté multidimensionnelle. L’urbanisation, l’évolution démographique et les progrès technologiques à venir risquent de perturber les progrès si les effets positifs qu’ils pourraient produire ne sont pas canalisés.
Femme et développement local durable :
Au Mali, les femmes qui représentent 75% de la main d’œuvre agricole pourraient apporter beaucoup plus en termes de croissance et de développement. Mais toute une série d’obstacles les freinent. Parmi ceux-ci la ségrégation du marché du travail, le difficile accès aux crédits dans les banques, entre autres. L’étude révèle aussi que les femmes ont moins accès à la terre à cause des régimes fonciers défavorables. Seulement 5% des femmes Maliennes sont des propriétaires terriennes. Dans certaines contrées rurales, leur charge alourdie par des travaux comme le ramassage du bois, le puisage de l’eau les empêche d’être autonomes.
En matière de formation professionnelle, il n’y a pas eu d’action spécifique majeure initiée dans le domaine du genre, aucune mesure incitative ou quota pour favoriser l’égalité du genre n’a été prévue ou étant timides.
L’égalité des sexes constitue un des principes directeurs du nouveau programme de développement durable qui comprend un ensemble de 17 objectifs mondiaux (ODD) à atteindre d’ici 2030, adopté par les États membres de l’ONU au sommet sur le développement durable. À travers un objectif spécifiquement dédié à l’égalité ainsi qu’à l’intégration transversale du genre, cet agenda permettra d’apporter une réponse aux causes structurelles des inégalités et des discriminations. Le Mali à l’instar des autres pays s’est engagé dans l’agenda 2030 et a donc souscrit aux objectifs de développement durable y compris les ODD 5 et 16, à savoir parvenir au respect de l’équité et à l’égalité des sexes et contribuer à l’autonomisation des femmes et les filles.
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